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JUSTICE CIVILE
27 octobre 2013

Chantage à l'appel

La voie de l'appel est naturelle lorsqu'on pense que le Tribunal n'a pas donné la juste interprétation aux faits qui lui ont été exposés. Mais, cette voie sert aussi de menace à ceux qui veulent négocier leur condamnation alors même que le jugement ne souffre d'aucune contestation sérieuse. Ces derniers ne se lassent jamais de regimber pour échapper à leur responsabilité. Même après avoir été condamnés, ces justiciables de mauvaise foi se croient autorisés à négocier leur condamnation, tel des maquignons cherchant à marchander jusqu'au bout, parfois ad nauseam.

Cette "négociation" prend la forme d'un chantage à l'appel quand le "condamné" menace son créancier d'interjeter appel s'il ne lui accorde pas un rabais sur la condamnation prononcée ou des délais de paiement. Pour soutenir sa réclamation, il invoquera la durée et l'aléa de la procédure d'appel, conscient que son créancier cherchera à recouvrer au plus vite son dû. Il ne faut pas se laisser abuser par ce procédé, même s'il faut rester pragmatique, sous réserve de prendre toutes les garanties quant à l'exécution effective des promesses de règlement adverse.

En amont, au-delà des rares possibilités de saisie-conservatoire, il est prudent de solliciter l'exécution provisoire du jugement à intervenir, ce qui limitera l'intérêt de l'appel pour le condamné puisqu'il devra s'exécuter malgré la procédure d'appel qu'il aura engagée.

En aval, il convient de maintenir la pression afin de dissuader son adversaire d'interjeter appel de la décision rendue, en lui rappelant que vous avez eu gain de cause et qu'il n'est pas en mesure de discuter, même s'il y a une partie de bluff dans ces échanges confidentiels. Si l'intimé bénéficie de l'exécution provisoire du jugement rendu, il pourra solliciter la radiation de l'affaire du rôle de la Cour d'Appel (article 526 du code de procédure civile) en cas d'inexécution du jugement par l'appelant. Cela signifie que le traitement de l'affaire sera suspendue devant la Cour, et non pas interrompue, jusqu'à ce que l'appelant s'acquitte de ses condamnations. La radiation peut être refusée s'il apparait que l'exécution serait de nature à entrainer des conséquences manifestement excessives ou que l'appelant est dans l'impossibilité d'exécuter la décision.

Ainsi, pour s'opposer au chantage à l'appel, il est bon de rappeler à son adversaire que son marchandage est déplacé, que vous n'hésiterez pas à faire jouer l'article 526 précité et que vous engagerez, à son encontre, les voies d'exécution qui lui feront supporter les frais d'huissier afférents.

A défaut d'exécution provisoire du jugement rendu, la menace de l'appel est plus pregnante. Mais, s'il appert que cette menace reflète un recours purement dilatoire, il faut exciper des articles 559 et 581 du code de procédure civile pour avertir l'adversaire qu'il devra répondre, en appel, d'une demande de condamnation à une amende civile, sans préjudice des dommages et intérêts que l'intimé lui réclamera. De même, si l'adversaire réclame des délais de paiement, il pourra lui être opposé qu'il n'a pas cru bon de les solliciter devant le tribunal, au titre de l'article 1244-1 du code civil, de sorte qu'il estimait lui-même qu'il n'était pas fondé à les obtenir. En général, s'il n'a pas formulé une telle demande devant le Juge, c'est qu'il ne voulait pas dévoiler son patrimoine pour justifier sa demande, dans l'hypothèse d'une futur saisie à son encontre. Il est toujours utile aussi de rappeler au condamné récalcitrant qu'il devra supporter en appel, outre ses frais d'avocat, la taxe de 150 euros que doit régler tout justiciable qui fait appel d'un jugement dans le cadre d'une procédure nécessitant l'assistance d'un avocat, Cet argument n'a, cependant, aucune portée à l'encontre de celui qui bénéficie de l'aide juridictionnelle dans la mesure où il en est dispensé. Le défaut de règlement de cette taxe entraine l'irrecevabilité de l'appel (Article 964 du c. proc. civile).

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  • La Justice civile est boudée par les médias qui préfèrent la Justice pénale alors que nos concitoyens sont beaucoup plus confrontés à la Justice civile. Le but de ce blog est de s'en faire l'écho. Juriste, Erga Omnes vous propose son retour d'expérience
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