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JUSTICE CIVILE
22 juin 2014

Décès de Mickael JACKSON et Préjudice affectif de ses fans français

Voici les termes du jugement rendu par la Juridiction de Proximité d'ORLEANS dans l'affaire opposant des fans de Mickael JACKSON au Docteur Conrad MURRAY, suvi d'un commentaire personnel:

 

JURIDICTION DE PROXIMITE D'ORLEANS

Jugement du 11 février 2014

R.G. n° 91-13-000432

Président: C.B.

Greffier: G.C.

Demandeurs: (34 demandeurs, représentés par Me LUDOT Emmanue, avocat au Barreau de REIMS)

Défendeur: Monsieur MURRAY Conrad, représenté par Me CHERNOFF Edward, avocat au Barreau de Houston (Texas)

A l'audience du 17 décembre 2013, les parties ont comparu comme il est mentionné ci-dessus et l'affaire a été mise en délibéré à ce jour.

Exposé des faits et de la procédure 

Suivant exploit transmis le 12 décembre 2013 à autorité compétente étrangère en application de la convention de La Haye du 15 novembre 1965,

Mesdames et Messieurs XYZ (noms des 34 demandeurs) ont saisi la Juridiction de Proximité d'une demande tendant à voir condamner Monsieur le Docteur MURRAY à payer à chacun des requérants individuellement la somme de 1 euro symbolique, en réparation de leur préjudice moral et affectif, en application des articles 14 et 1382 du code civil,

Au soutien de leur demande, leur conseil expose:

- qu'il ne peut être contesté que la pop star Mickael JACKSON est décédé dans des conditions qui ont entraîné la mise en place d'une poursuite pénale à l'encontre du docteur MURRAY, médecin traitant de la pop star disparue, ni que celui-ci a été condamné à quatre ans d'emprisonnement du chef de coups et blessures volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner à son patient, le chanteur Mickael JACKSON;

- que chacune des parties demanderesse justifie d'un intérêt à agir par un préjudice affectif et moral lié à la perte du chanteur dont ils avaient une admiration sans borne;

- que s'appuyant sur la motivation de l'ordonnance en date du 29 mars 2013 du président du tribunal de grande instance d'ORLEANS et en application de l'article 1382 du code civil, il y a lieu que soit condamné le dcoteur MURRAY à payer à chacune des parties requérantes une somme de 1 euro symbolique;

- que l'action est recevable au regard des dispositions de l'article 14 du code civil, la Cour de Cassation ayant rappelé et étendu le principe énoncé dans cet article, et qu'en conséquence les dispositions de cet article ont vocation à s'appliquer lorsque l'action est introduite à l'encontre d'un étranger sur le territoire français, devant les tribunaux français, par application des dispositions de l'article 1382 du Code civil;

Les parties ont été convoquées à l'audience du 17 décembre 2013; bien que régulièrement avisé de la date de l'audience, le défendeur étant non comparant ni représenté, la juridiction est régulièrement saisie et le présent jugement sera réputé contradictoire; En applications des dispositions de l'article 450 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe à la date du 11 février 2014;

Motif de la décision

Attendu que l'article 14 du code civil autorise la citation devant les tribunaux français d'un étranger même non résidant en France;

Attendu qu'en dépit de l'absence du défendeur la décision sera réputée contradictoire conformément aux dispositions de l'article 473 alinéa 2 du code de procédure civile;

Attendu qu'il convient de retenir l'application de l'article 1382 du code civil;

Qu'en l'espèce, au vu des conclusions et pièces versées aux débats auxquels il conviendra de se référer en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est constant:

- que la preuve de la faute du docteur MURRAY peut facilement être rapportée du seul fait de la sanction pénale ayant condamné celui-ci après l'avoir reconnu coupable du chef d'homicide involontaire sur la personne de Mickael JACKSON;

- que le décès de Mickael JACKSON a affligé certains de ses admirateurs;

Attendu que la condamnation à réparation même si elle est limitée à l'euro symbolique nécessite la démonstration de la réalité du préjudice moral;

- que les attestations et documents produits aux débats par Mesdames et Messieurs XY (5 demandeurs) sont suffisants pour démontrer la réalité du préjudice moral qu'elles ont subis consécutivement au décès de la pop star;

Qu'il convient en conséquence de condamner docteur MURRAY à payer la somme de 1 euro symbolique à Mesdames et Messieurs XY (5 demandeurs), pour préjudice moral;

Que faute d'élément suffisants, il convient de débouter Mesdames et Messieurs ZZ (29 autres demandeurs), de leur demande de dommages et intérêts pour préjudice moral;

Attendu qu'en application des dispositions de l'article 686 du code de procédure civile, Monsieur le docteur Conrad MURRAY qui succombe sera condamné aux dépens;

PAR CES MOTIFS

Le Juge de Proximité, statuant publiquement, par jugement réputé contradictoire et en dernier ressort,

CONDAMNE Monsieur le Docteur Conrad MURRAY à verser à Mesdames et Messieurs XY (noms de 5 demandeurs), la somme de UN EURO (1 euro) chacun pour préjudice moral;

DEBOUTE faute d'éléments suffisants, Mesdames et Messieurs ZZ (29 autres demandeurs), de leur demande de dommages et intérêts pour préjudice moral;

CONDAMNE le Docteur Conrad MURRAY aux dépens de l'instance.

Ainsi jugé et mis à la disposition des parties les jours, mois et an que dessus et signé par le Président et le Greffier sus nommés.

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Commentaires: Comme dans de nombreuses affaires, la qualité de presse est très inégale selon les titres. Là encore, on a pu lire que la décision avait été rendue par un juge des référés du tribunal de grande instance ou par un tribunal d'instance, alors qu'il s'agissait de la Juridiction de Proximité d'Orléans. Par contre, d'une façon presqu'unanime, ces organes de presse ont repris l'information selon laquelle cette Juridiction d'Orléans aurait reconnu un « préjudice d'affection ». Or, à la lecture du jugement, on ne peut que constater que ce « préjudice d'affection » n'est évoqué que par l'avocat des requérants et n'est pas repris par le Juge dans son dispositif, lequel ne mentionne que l'habituel « préjudice moral ». L'originalité de ce jugement réside néanmoins dans le fait que le tribunal a accepté d'indemniser symboliquement certains requérants alors qu'ils n'avaient aucun lien de parenté avec Mickael JACKSON et qu'ils n'établissaient pas avoir entretenu de lien affectif réel avec ce dernier, lequel ignorait sans doute même leur existence. Le risque d'une telle décision est d'attiser l'appétit de futures « victimes » indirectes de la mort « accidentelle » de leur idole (acteurs, chanteurs, politiciens, etc...). Qu'en aurait'il été si les catholiques français avaient engagé une procédure en indemnisation contre l'auteur de coups de feu à l'encontre du Pape Jean-Paul II, en 1981 ? L'intérêt ne serait que de se voir reconnaître le statut de victime puisque l'insolvabilité de l'auteur ruinera rapidement tout espoir d'enrichissemment. Comme toujours, l'enjeu financier sera plus intéressant si le fait dommageable est couvert par l'assureur de l'auteur. Les cas les plus classiques seront ceux où la star aura été victime d'un accident de la route ou d'une erreur médicale. Les assureurs des responsables de ces accidents provisionneront sans doute désormais l'indemnisation future de ces nouvelles victimes indirectes.

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  • La Justice civile est boudée par les médias qui préfèrent la Justice pénale alors que nos concitoyens sont beaucoup plus confrontés à la Justice civile. Le but de ce blog est de s'en faire l'écho. Juriste, Erga Omnes vous propose son retour d'expérience
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