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JUSTICE CIVILE
16 décembre 2013

Le photovoltaïque sous perfusion fiscale

Que serait devenu le secteur du photovoltaïque, pour les particuliers, sans la TVA à taux réduit et le crédit d'impôt ? Sans doute pas grand chose.

Par un arrêt du 20 juin 2013 (Affaire C-219/12), la Cour de Justice de l'Union Européenne lui apporte un nouveau soutien en ayant reconnu à un particulier autrichien le droit de déduire le montant de la TVA qu'il avait payée lors de l'achat de son installation photovoltaïque. Les juges européens ont considéré que la revente de l'électricité produite par ces panneaux solaires au fournisseur d'électricité et réinjectée dans le réseau public constituait une activité économique. Ce particulier retirait de son installation des recettes ayant un caractère permanent. Le fait que la quantité produite serait inférieure à celle consommée par son foyer était indifférente, selon la CJUE.

La décision rapportée se justifie par le fait que l'installation était dépourvue de capacité de stockage de l'énergie produite et que le contrat d'achat d'électricité avait été conclu pour une durée indéterminée, ce qui explique le caractère permanent des recettes.

Rien ne semble s'opposer à ce que cette jurisprudence europérenne puisse être exploitée en France afin de permettre aux propriétaires de panneaux photovoltaïques, sous les conditions visées ci-dessus, de solliciter le remboursement de la TVA qu'ils avaient payée lors de l'achat de leur installation, s'ils revendent leur production à EDF. Les fins fiscalistes ne manqueront pas de se prononcer sur ce point.

L'enjeu financier n'est pas mince et pourrait alimenter les arguments des vendeurs d'installations photovoltaïques, dont certains ne s'embarasseront pas des conditions imposées par la CJUE. 

Il sera précisé que, depuis le 1er avril 2012, les particuliers producteurs d'énergie ne doivent pas inclure la TVA sur leur facture destinée à l'acheteur ( ex: EDF) car il appartient à ce dernier de s'acquitter directement de la TVA à l'Etat, en application de l'article 283 du Code Général des Impôts.

Il faut rappeler que pour ce type d'installation, la TVA à taux réduit s'applique tant sur le prix du produit que sur la main d'oeuvre, à la différence du Crédit d'Impôt Développement Durable (CIDD) qui exclut la main d'oeuvre de sa base de calcul. On sait qu'il n'est pas rare, dans ce secteur d'activité, que des sociétés peu sérieuses n'hésitent pas à gonfler artificiellement le prix du produit, sur leur facture, et à réduire voire à offrir la main d'oeuvre pour que le client obtienne un CIDD plus avantageux.

Il ne faut pas oublier non plus que l'acquisition d'un tel équipement est exclu du CIDD en cas de revente de l'électricité produite, sauf si la revente porte uniquement sur la partie non consommée de la production et qu'elle n'excède pas la consommation de l'habitation principale du propriétaire.

En tout état de cause, si le bénéfice du CIDD est prévu dans les conditions de l'article 200 quater 1-c du C.G.I., à compter du 1er janvier 2014, les panneaux photovoltaïques ne bénéficieront plus de cet avantage fiscal, étant précisé que le CIDD sera simplifié pour les autres équipements éligibles (2 taux applicables au lieu de 10). On est encore loin du choc des simplifications, mais c'est un début.

Il était temps que l'Etat arrête de financer des installations photovoltaïques au bénéfice de sociétés aux pratiques indélicates dont les liquidations judiciaires ne cessent d'augmenter tous les mois, au détriment de leurs clients et créanciers. L'emploi dans le secteur du photovoltaïque en a subi logiquement les conséquences, les effectifs sont passés de 25 000 à 10 000 personnes en moins de 4 ans *.

Pour leurs clients qui avaient réussi à obtenir l'annulation du contrat de vente de leur installation photovoltaïque, ils n'auront pas forcément intégré le fait qu'ils devront restituer le CIDD qu'ils avaient perçu, le contrat étant rétroactivement annulé. Le vendeur, vexé par cette annulation, pourrait en aviser le fisc, dans un grand élan de civisme, afin de signaler l'enrichissement sans cause de leur ex-client.

Les clients ne peuvent qu'être incités à surveiller leur devis et facture d'achat d'installation photovoltaïque afin de s'assurer que ces documents répondent aux exigences du C.G.I. au regard du bénéfice du crédit d'impôt. Face à des promesses d'avantages fiscaux merveilleux, ils verront que ces commerciaux, peu scrupuleux, prennent la précaution de ne jamais contractualiser leurs informations verbales sur ce point afin d'éviter d'inévitables recours. Cela en dit long sur la fiabilité de leurs promesses.

Compte tenu du prix exorbitant de ces installations (photovoltaïque, éolienne), leur rentabilité est plus que discutable, si l'on prend en considération les pannes qui peuvent survenir dans le délais d'amortissement, pannes d'autant plus prévisibles au regard de l'amateurisme de nombreux prestataires dans ce secteur. L'économie du contrat proposé au client est souvent très séduisante, la réalité l'est beaucoup moins. Après l'installation des panneaux solaires, les performances et les économies promises sont rarement au rendez-vous et la rentabilité très discutable car les estimations de production d'électricité sont parfois irréalistes.

Le montage de l'opération, présentée par des commerciaux peu scrupuleux, prévoit un autofinancement du projet grâce à la revente de l'électricité produite et au crédit d'impôt. Ces projets sont souvent financés par les crédits affectés, laissant penser au client qu'il remboursera facilement son crédit grâce à la revente de l'électricté, alors même que la rentabilité annoncée est souvent très éloignée de la réalité. Même quand le contrat principal (installation photovoltaïque) est annulé et que le contrat de crédit affecté tombe aussi, il n'est pas toujours possible d'être dispensé de rembourser les sommes versées par l'établissement de crédit s'il n'a pas commis de faute. Cela se complique d'autant plus quand le vendeur des panneaux photovoltaïques est en liquidation judiciaire et qu'il ne peut plus rembourser à son client les sommes reçues.

La suppression des avantages fiscaux liés à ces installations phovoltaïques serait sans doute salutaire; seules pourraient rester les sociétés sérieuses apportant des garanties de fiabilité et de performance de leurs installations. Les clients seront plus regardants face à l'investissement qu'ils s'engageront à faire dans la mesure où ils ne pourront pas faire en supporter une partie du coût par la communeauté, via les niches fiscales.

* Source: Le Figaro éco du 13/12/2013

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