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JUSTICE CIVILE
2 août 2013

Mieux vaut filmer des cambrioleurs que sa femme

Selon un récent arrêt de la Cour d'Appel d'AMIENS, le fait d'installer des micros et caméras dans le domicile conjugal (dans le but d'espionner sa femme) présente un caractère injurieux pour l'épouse et constituent dès lors une faute grave et renouvelée imputable à l'époux de nature à rendre intolérable le maintien de la vie commune.

Extraits de l'arrêt de la Cour d'Appel d'Amiens, Chambre de la Famille, rendu le 27 juin 2013, n° R.G.: 12/02114:

DECISION :

Mme Y et M. X se sont mariés par devant l'officier d'état civil de la ville de LAS VEGAS (USA) le 12 juillet 1995. Un enfant est issu de leurs relations prénuptiales : V. Le 16 octobre 2007, Mme Y a présenté une requête en divorce. Par ordonnance de non-conciliation en date du 10 décembre 2007, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Saint-Quentin a autorisé les époux à résider séparément, attribué à M. X la jouissance du domicile conjugal, ..., et fixé à XXX € le montant de la pension alimentaire mensuelle due par Mme Y à M. X au titre du devoir de secours. Le 19 mai 2009, Mme Y a fait délivrer à son époux une assignation en divorce pour altération définitive du lien conjugal sur le fondement des dispositions de l'article 237 du code civil. M. X a formé une demande reconventionnelle en divorce pour faute sur le fondement des dispositions de l'article 242 du code civil. Par jugement rendu le 18 avril 2012, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Saint-Quentin pour l'essentiel a prononcé le divorce des époux à leurs torts partagés, ordonné la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux des époux en tant que de besoin, condamné Mme Y à payer à M. X la somme de XXX euros à titre de prestation compensatoire... Par déclaration du 18 avril 2012, M. X a interjeté appel général de ce jugement.

Par conclusions du 22 avril 2013, M. X fait valoir que son épouse cherche à se débarrasser d'un mari malade devenu encombrant, ... qu'elle a, ensuite, purement et simplement abandonné le domicile conjugal après avoir acquis une maison dans laquelle elle réside toujours, qu'ainsi la seule cause de la rupture est l'abandon par l'épouse du domicile conjugal et la ou les relations extra-conjugales qu'elle a entretenues dès 2005, que le juge aux affaires familiales a retenu le caractère fautif de la relation de Mme Y avec M. A excédant largement le cadre d'une relation professionnelle mais que ce magistrat a également cru devoir retenir à son encontre une 'attitude humiliante' qui contrevient aux 'devoirs de respect posés par l'article 212 du code civil.... L'appelant ajoute que ... sur le verso de l'attestation Mme T expose encore qu'il 'aurait installé des micros et caméras pour espionner son épouse. Il en a parlé ouvertement devant moi '', grief retenu à tort par le juge aux affaires familiales alors que cette affirmation était inconnue de lui et fausse, qu'il a pu dire que sa femme avait un amant et qu'il la faisait surveiller, ce comportement n'ayant rien d'humiliant au regard de l'infidélité de son épouse, que le juge aux affaires familiales a retenu également le témoignage de Mme B, ..., que ce témoin fait état de son ressenti quant à la présence de caméras dans le domicile conjugal alors que rien ne permet de qualifier cette installation comme fautive, que son épouse est dans l'incapacité de rapporter la preuve d'un comportement injurieux de sa part qui aurait pu expliquer ou excuser l'abandon du domicile conjugal et l'infidélité de celle-ci, qu'il n'a toujours pas compris la raison de cet abandon après 35 années de vie commune, et alors que le couple, jusque 2005, avait toujours vécu harmonieusement, qu'il a été largement bafoué et subit, depuis le début de la procédure, les attitudes vexatoires et humiliantes de son épouse.

Par conclusions du 19 avril 2013, Mme Y demande à la Cour de dire et juger M. X mal fondé en son appel, en conséquence l'en débouter purement et simplement, la dire et juger recevable et bien fondée en son appel incident, y faisant droit, infirmer ledit jugement des seuls chefs du prononcé du divorce aux torts partagés des époux et de la prestation compensatoire, statuant à nouveau, prononcer le divorce aux torts exclusifs de M. X , en application des dispositions de l'article 242 du code civil, avec toutes conséquences de droit, dire n'y avoir lieu à prestation compensatoire au profit de M. X et, en conséquence, débouter purement et simplement celui-ci de sa demande, y ajoutant condamner M. X à lui payer la somme de 4.500 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1382 du code civil, en réparation du préjudice subi, confirmer le jugement entrepris en toutes ses autres dispositions non contraires, ....  Elle ajoute encore qu'elle aurait pu continuer à subir en silence les violences verbales et physiques de son époux s'il n'était allé jusqu'à installer dans les pièces du domicile conjugal, y compris la chambre du couple, un système de vidéo surveillance, ce dont atteste Mme C.B, épouse H, amie du couple, qui en a été choquée, trouvant cela malsain, et Mme T, M. X s'étant vanté en sa présence de ce système de surveillance, et celle d'autres amis du couple, ces témoignages étant directs et circonstanciés, que M. X ne conteste d'ailleurs pas avoir installé des caméras dans le domicile conjugal et dans la chambre du couple mais attribue son absence de commentaire sur le témoignage accablant de Mme H, en soutenant faussement qu'elle se serait prévalue dudit témoignage sans lui en avoir adressé copie, que c'est à juste titre que le juge aux affaires familiales a fondé sa conviction sur le comportement fautif de M. X sur la base de ces témoignages, que c'est ensuite et en raison de cette ultime humiliation qu'elle a quitté le domicile conjugal afin de conserver sa dignité,...

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le prononcé du divorce : Aux termes de l'article 242 du code civil, le divorce peut être demandé par l'un des époux lorsque des faits constitutifs d'une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage sont imputables à son conjoint et rendent intolérable le maintien de la vie commune. C'est à juste titre que le premier juge a retenu que les pièces permettent d'établir :

- d'une part que la relation entretenue entre l'épouse et M. A au vu des courriels rédigés à partir de la messagerie de Mme Y à une date antérieure à son départ du domicile conjugal, excédant largement le cadre d'une relation professionnelle est de celle qui présente un caractère injurieux pour l'époux et constitue dès lors une faute grave et renouvelée imputable à l'épouse de nature à rendre intolérable le maintien de la vie commune,

- et d'autre part que le témoignage de Mme T indique très clairement que l'époux a lui-même déclaré devant elle qu'il avait installé des micros et caméras dans le domicile conjugal, ce qu'un autre témoin Mme H a elle-même constaté, alors que de tels faits présentent un caractère injurieux pour l'épouse et constituent dès lors une faute grave et renouvelée imputable à l'époux de nature à rendre intolérable le maintien de la vie commune. En conséquence, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres griefs des époux, il apparaît que le premier juge a fait une exacte appréciation des faits en prononçant le divorce aux torts partagés des époux.

En conséquence, le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur les demandes en dommages et intérêts : Le divorce ayant été prononcé aux torts partagés, toute demande de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 266 du code civil doit être rejetée. Et aucune des parties ne justifiant suffisamment au vu des pièces régulièrement communiquées d'un préjudice distinct de celui qui résulte du divorce, toute demande en dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1382 du code civil doit être également écartée comme étant non fondée. En conséquence, le jugement ayant rejeté les autres demandes des parties sans précision quant aux demandes de dommages et intérêts dont le premier juge avait pourtant motivé le rejet, il sera ajouté en ce sens au dispositif du présent arrêt.

Sur les autres dispositions :... Les autres dispositions du jugement, non contestées, seront confirmées.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, après débats en chambre du conseil, contradictoirement et en dernier ressort, Confirme le jugement en toutes ses dispositions, … Y ajoutant, Déboute les parties de leurs demandes respectives de dommages et intérêts, ...

LE GREFFIER, LA PRESIDENTE,

 

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